jeudi 16 juillet 2015

Golfe du Mexique, la Lente Route ...

On ne part pas un vendredi ... On a fait, on a perdu! Cela nous apprendra à ne pas vouloir être superstitieux ...

460 milles en 6 jours, soit 3.20 nœuds de moyenne, on aura jamais été aussi lents sur l'eau.

Nous quittons St Pete, FL de bon matin. Dès la sortie de notre zone de mouillage nous hissons la grand-voile et 8 à 10 noeuds de vent nous accueillent et nous permettent de sortir le génois. Nous filons ainsi toutes voiles dehors en direction de la sortie de la baie. Nous approchons du Sunshine Skyway bridge qui représente la "sortie" de la baie de Tampa, le vent baisse un peu.

Nous naviguerons ensuite avec 7 noeuds de vent au bon plein, la mer est plate et avec 7 noeuds on en "fabrique" 11 et filons donc plus de 6 noeuds. C'est parfait, on souhaite que cela dure des jours...

Hélas dès le soir, le vent tournera. Avec un vent faible au portant, nous n'avançons guère... Nous ne sommes pas pressés, le Mexique c'est droit devant donc c'est pas grave de se traîner...



Le soleil couchant apporte son lot de nuages d'orages qui grossissent et se multiplient de façon inquiétante. Il est 11h quand les premiers grondements éclatent et les éclairs déchirent le ciel, au loin d'abord puis ensuite à proximité. A minuit, le ciel est en permanence blanchi par les éclairs incessants, la foudre, aveugle et en colère, frappe tout autour de nous. A 1h du matin, c'est l'apocalypse, nous ne pouvons même plus regarder le ciel car de monstres flash nous insensibilise la rétine et nous rend aveugle pendant 1 à 2 secondes... On voit la foudre tomber à portée de main. A ce moment là et ce pendant des heures je suis certain que nous allons nous faire foudroyer - nous sommes dans l'enfer électrique le plus puissant que je n'ai jamais vu - reste à savoir "quand" nous allons nous faire attraper par un de ces éclairs qui continuent leurs rondes infernales autour de nous... Je vous dispense des épisodes techniques consistant à gérer les rafales de vent qui accompagnaient ces orages violents avec manœuvres de ris successives...

C'est par miracle (on a parlé d'enfer c'est donc le terme juste) qu'au petit matin, on sort indemne de cette horreur. Le vent disparaîtra aussi, nous obligeant à continuer au moteur dans une mer démontée par cette nuit dantesque que rien n'annonçait.

Toile d'ombrage en bache chinoise ...
La mer se calmera petit à petit, nous aussi. En effet, il est très éprouvant de vivre des épisodes de tensions longues pendant lesquels nous sommes comme victimes offertes et sans défense.

Le soir d'après nous scrutons l'horizon à la recherche de nuages qui pourraient apparaître. Rien. Notre vigilance ne décroit pas pour autant. Plus tard, quelques éclairs au loin nous rappellerons la nuit d'avant mais rien d'autre, ni orage, ni vent.

Les journées de succéderont ainsi, vent faible, très faible - rien à voir avec les prévisions météo - et chaleur éprouvante qui nous fera prendre plusieurs douches par jour. Nous installerons même des bâches de protection temporaires pour faire un peu d'ombre sur l'instrumentation extérieure qui montre des signes de débilité.


Lecture à l'ombre ...


Nous aurons une journée avec quelques grains "classiques" avec des rafales nous autorisant à sortir un peu de génois pour profiter de ces mouvements d'air frais et ainsi avancer "un peu" plus vite, mais ce sera de courte durée...

Lecture, guitare et autre activités culinaires prennent le pas sur la monotonie de ces journées calmes. Un thon de 5Kg viendra même faire l'honneur de notre table. Ce dernier à eu le temps de se faire bouffer un morceau par un autre carnassier suffisamment gros pour s'attaquer à un thon de cette taille en détresse.


Il nous en reste pour quelques repas de sushi et de mi-cuits ...


Seul bémol, le moteur chauffe un peu et nos réserves de carburant diminuent dramatiquement. Nous devons faire les niveaux de liquide de refroidissement toutes les 12h, puis les calculs de consommation de carburant et de prédictions d'arrivée commencent... c'était sans compter sur le courant.

Nous avions 1.5 noeuds de courant avec nous jusqu'ici. Tout est normal car à l'aller nous avons eu 1.5 noeuds avec nous pendant 10h et le reste du temps nous avons eu ce même courant contre nous. Donc, forts de cette expérience ajoutée à la lecture des ouvrages concernés ainsi que des pilots-charts, nous étions en droit (je hais cette expression) de nous attendre à "l'inverse" sur le chemin inverse... Par logique simple mais renseignée. Nous nous attendons donc à avoir un courant contraire de 1.5 nœuds dans les dernières 12h... Ce sera 48h avant d'arriver dans le passage entre Mexique et Cuba que le courant viendra contrer notre avance déjà lente. Celui-ci montera jusqu’à près de 5 nœuds, nous obligeant à partir "en fuite et en crabe" à 90° de notre route afin d'échapper à ce phénomène (rare mais on l'a eu!). On "perdra" quasiment 24h dans l'histoire avec des routes fond sur notre axe de 0.4 noeuds et 2.5 en latéral...

Les côtes mexicaines arrivent dans notre mire... enfin ! Nous devons contourner le cap Catoche et l'ile Contoy car nous sommes partis très à l'Est pour échapper à ce bon-sang de courant qui ne lâchera prise qu'au dernier moment. Il est prévu que nous arriverons à la zone de mouillage tardivement dans la nuit. Nous devons prendre la passe du récif nord puis éviter les hauts fonds d'un coté et les bancs de sable de l'autre, puis aller virer une bouée située à une encablure (200m) de la plage et de son ressac, on ne sait pas encore comment sera le courant (de face ou latéral), cela va être une partie de plaisir de faire ça de nuit ... Couronnement princier, le niveau de carburant est très inquiétant (la jauge déconne et nous avons déjà mis nos bidons de réserve) et je crains une panne sèche à un moment critique. Couronnement royal, le moteur ne veut plus monter dans les tours et plafonne à 1600 tours. C'est donc dans cette ambiance ou tout peut arriver que nous arrivons à Isla Mujeres. Heureusement, tout se passera bien - le passage de la bouée près de la plage un peu tendu quand même - et à la lueur de nos projecteurs nous nous trouverons une place parmi les bateaux déjà au mouillage ... Il est 2h30 et après les vérifications habituelles, on à pu se détendre devant une bonne bière bien méritée...


Même les bancs de sargasses se sont mis en tête de nous ralentir ...


1 commentaire:

  1. Quel dommage de ne pas avoir pensé à sortir votre appareil photo pour nous montrer ce festival lumineux et nous donner le frisson !!! Mais où aviez vous donc la tête ? ( humour ).....heu là , je n'aurai pas aimé être à bord ...mais à lire c'est passionnant ! Vous êtes mes héros. 100000 bises de Syb.

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